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Répertoire

Alain Arnould

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Sainte Catherine de Sienne (1347-1380)
Fêtée le 29 avril

C'est le frère Alain Arnould op du couvent Sainte-Catherine de Sienne
à Tallinn (Estonie) qui nous en parle !

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Vitrail représentant Sainte Catherine de Sienne au couvent dominicain de Tallinn qui lui est dédié

Quand Caterina nait à Sienne en 1347, la ville toscane est au sommet de sa gloire. Rien ne paraît démesuré à ses habitants, qui s’engagent dans un ambitieux agrandissement de leur cathédrale. La famille de Catherine, les Benincasa, fait honneur à son nom : vingt-deux frères et sœurs l’ont précédée, deux autres la suivront. Cependant, comme un coup de tonnerre dans un ciel clair, la peste s’abat sur la ville en 1348, décimant un tiers de sa population. La fragilité de la vie qui a tant marqué la vie de Catherine, s’impose.

Alors que ces parents tentent de l’attribuer en mariage, elle est décidée à consacrer sa vie à Dieu. N'ayant pas les moyens de rassembler une dot pour entrer au monastère, Catherine souhaite s’engager comme tertiaire dans l’Ordre des Prêcheurs mais étant trop jeune, elle essuie un refus. Atteinte d’une grave maladie, Catherine craint de mourir sans avoir pu faire son engagement. Face à la ferveur et à la détermination de Catherine, la prieure de la fraternité finit par changer d’avis. En 1363, Catherine fait profession et, comme laïque de l’Ordre de saint Dominique, reçoit l’habit de ‘mantellata’. Elle s’engage dans l’accompagnement des malades et s’efforce de désamorcer les rivalités entre quartiers siennois.

À partir de 1370, elle dicte des lettres conférant conseils, exhortant à un engagement plus chrétien ou offrant son réconfort à ceux qui sont en détresse. En dix ans, ce sont quelque 386 lettres qui sont adressées à un public aussi varié que le pape d’Avignon, les politiciens locaux ou les amis. En 1374, le chapitre général lui nomme un confesseur attitré en la personne du frère Raymond de Capoue. Il l’introduit au pape en Avignon afin de sommer le pontife de rentrer à Rome. Grégoire IX s’y conforme mais meurt peu de temps après provoquant une nouvelle crise ecclésiale. En 1378, Catherine publie son testament spirituel, le Dialogue de la Divine Providence, qui est autant un chef d’œuvre majeur de la littérature en langue italienne que de la littérature mystique.

Tout au long de cette vie foisonnante, Catherine vit des expériences mystiques : vision, stigmates, extases et moments de prières intenses que certains n’ont pas manqué d’interpréter comme maladifs. Elle meurt en 1380 des suites d’anorexie et est ensevelie à la Basilique de Sainte Marie sur la Minerve à Rome.

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Tallinn, couvent Sainte-Catherine de Sienne

Grâce à ses écrits, le culte de Catherine se répand rapidement. Canonisée en 1461, la mystique de Sienne inspire de nombreuses femmes à rejoindre les monastères dominicains qui ont adopté la réforme de Raymond de Capoue. Sa contribution à la littérature italienne, ses engagements pour pacifier familles et villes, son amour pour l’Église et ses efforts pour ramener le pape à Rome lui ont valu d’être nommée patronne d’Italie (1939). Ses écrits en font la première femme à recevoir le titre de docteur de l’Église (1970). Finalement, avec Edith Stein et Brigitte de Suède, Catherine devient co-patronne de l’Europe (1999), le pape rappelant à cette occasion que les chrétiens ont le devoir d'apporter à la construction de l'Europe une contribution spécifique, qui aura d'autant plus de valeur et d'efficacité qu'ils sauront se renouveler à la lumière de l'Évangile. Ils se feront alors les continuateurs de cette longue histoire de sainteté qui a traversé les diverses régions de l'Europe au cours de ces deux millénaires (1).

Une relique de sainte Catherine de Sienne se vénère dans notre pays à Astenet, non loin de la frontière où Allemagne, Pays-Bas et Belgique se rencontrent. En ces temps de bruits de bottes, il est bon de se souvenir que Catherine insistait sur la réforme des mœurs, qu'elle proposait à tous sans exception. Aux rois, elle rappelait qu'ils ne pouvaient gouverner comme si le royaume était leur « propriété »: bien conscients qu'ils auraient à rendre compte à Dieu de la gestion du pouvoir, ils devaient plutôt assumer la tâche d'y maintenir « la sainte et véritable justice », se faisant « pères des pauvres » (cf. Lettre n. 235 au Roi de France). L'exercice de la souveraineté ne pouvait en effet être séparé de celui de la charité, qui est l'âme à la fois de la vie personnelle et de la responsabilité politique (cf. Lettre n. 357 au Roi de Hongrie) .

(1) cfr. Jean-Paul II, Spes aedificandi. Lettre Apostolique en forme de «Motu Proprio» pour la Proclamation de sainte Brigitte de Suède, sainte Catherine de Sienne et sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix, co-patronnes de l'Europe, Vatican 1999, n° 1.


Pour en savoir plus :

Catherine de Sienne, Les Oraisons, « Sagesses chrétiennes », Paris (Cerf), 1992.

Catherine de Sienne, Lettres de sainte Catherine de Sienne, « Livres d'Or des Écrits Mystiques », Paris (Pierre Téqui éditeur,) 1999.

Catherine de Sienne, Le Livre des dialogues, suivi de lettres, préface et traduction de Louis-Paul Guigues, Paris (Éditions du Seuil), 2002

André Vauchez, Catherine de Sienne. Vie et passions, Paris (Cerf), 2015.

Maxence Caron (sous la direction de) et François Daguet (Préface), Catherine de Sienne. Œuvres complètes, Paris (Les Belles Lettres), 2019.

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Crédit photo : Lawrence Lew OP