Depuis que l'homme existe, l'amour est cette éclatante évidence dont le contenu reste toutefois indicible ; à la rigueur, on ne peut s'ingénier à dire comment, jamais pourquoi ni quoi.

Tout simplement : "Ils s'aimaient l'un et l'autre, parce que tout le désirait ainsi : la terre au-dessous, le ciel au-dessus, les nuages et les arbres...", ou encore : "parce que c'était lui, parce que c'était elle".

Aucun des grands penseurs ni des poètes n'a jamais trouvé de réponse à la question : qu'est-ce que l'amour ? Nous ne pouvons rien dire de sa naissance, et, au sommet de son élévation, l'âme devient musique pure et arrête toute parole. Peut-on emprisonner la lumière, elle glisse à travers les doigts. Si une formule de l'amour était possible, on aurait trouvé la formule même de l'homme. Quand toutes les flèches de l'intelligence sont épuisées, il reste la dernière, celle du mythe, pour nous parler de l'essence transrationnelle profondément mystérieuse.

Il faut aller bien au-delà de l'amour, l'amour est plus que l'amour, jusqu'à cette profondeur de l'esprit où la passion, tout en sauvegardant la densité de son contenu, se libère de toute exaltation charnelle et devient l'axe immobile d'une roue qui tourne.

En transcendant le sensuel, l'amour donne une profondeur insoupçonnée à la chair. Clairvoyant et prophétique, il fait voir l'âme de l'aimé en terme de lumière et ainsi transfiguré, il y contemple l'innocence originelle, telle que Dieu la voit.

L'être aimé n'est pas un dieu, mais un don royal frappé de la présence du Donateur. Dante le dit très simplement : "Elle regardait Dieu, et moi je Le regardais par ses yeux, et le ciel était plus beau."