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Répertoire

Richard Steenvoorde, OP

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Ce que j'ai appris à Rome sur une église synodale

fr Richard Steenvoorde, OP s’est rendu à Rome fin octobre, en tant que président de l’équipe synodale des Pays-Bas. Compte rendu en mots et images.« L’Église de demain ne se construira pas par davantage de décrets ou de structures, mais grâce à des personnes qui oseront l'écoute. »

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fr Richard Steenvoorde, OP à Rome, octobre 2025

Fin octobre, je me suis rendu à Rome pour le lancement de la phase de mise en œuvre du Synode mondial sur la synodalité. Il s’agissait de la nouvelle étape d’un processus entamé en 2021, au cours duquel des millions de catholiques à travers le monde ont réfléchi à l’avenir de l’Église. Cette nouvelle phase n’appelle plus à la réflexion, mais à la mise en pratique : comment vivre réellement ce que nous avons découvert ?

J’ai eu la chance de participer à la délégation en tant que président technique de l’équipe synodale néerlandaise, aux côtés d’Anneke van der Kamp–van Saase (secrétaire générale de la Conférence épiscopale des Pays-Bas) et de Monique Witte (représentant le Réseau des Femmes Catholiques).

Au fil des jours passés à Rome, nous avons rencontré des représentants de dizaines de pays, échangé avec le pape, pris part à des célébrations, des ateliers et des sessions conférences. Le fil conducteur était : comment faire de la synodalité non pas un projet, mais une manière d’être ?

Richard Steenvoorde, OP


“Cette écoute, en elle-même, peut déjà être évangélisatrice”

Pas une campagne, mais une manière de vivre

Lors de la rencontre, le pape Léon XIV a parlé en toute ouverture de ce qu’il appelle la « dimension constitutive de l’Église ». L’Église, a-t-il dit, n’est pas d’abord une organisation dotée d’une structure hiérarchique, mais un peuple de Dieu qui marche ensemble. Syn-hodos signifie littéralement « sur le même chemin ».

Le pape a souligné que la synodalité n’est ni une campagne ni une expérience passagère, mais une attitude de vie qui commence par l’écoute. « Écouter est un don d’une grande valeur, a-t-il déclaré, qui commence par l’écoute de la Parole de Dieu, de nos frères et sœurs, et de la sagesse que nous trouvons chez les hommes et les femmes, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Église — y compris chez ceux qui cherchent la vérité sans se considérer comme croyants. »

Ces paroles m’ont touché. Elles ont mis en mots ce que je vis souvent dans mon travail d’aumônier d’étudiants : les jeunes ne désirent pas tant des réponses qu’une présence capable d’écouter vraiment. Et cette écoute, en elle-même, peut déjà être évangélisatrice.

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De la réflexion à la pratique

Le Secrétariat du Synode a établi pour les trois années à venir un plan d’action concret. Le pape a appelé l’Église universelle à traduire les intuitions du synode en initiatives locales rendant la vie communautaire plus transparente, plus participative et plus missionnaire.

Les cinq grands objectifs de cette phase sont :

1. Mettre en pratique la synodalité – traduire les décisions du synode en actions concrètes.

2. Former une culture synodale – apprendre à écouter, à discerner et à assumer ensemble la responsabilité.

3. Favoriser la communion – encourager l’échange et la collaboration entre diocèses et régions.

4. Stimuler le renouveau pastoral et missionnaire – ne pas seulement transformer les structures, mais convertir les cœurs.

5. Accompagner, évaluer et persévérer – veiller à ce que le processus ne s’essouffle pas, mais s’enracine durablement.

Au fil de nos sessions, ces thèmes revenaient sans cesse. Nous avons réfléchi à la manière de mettre en œuvre, à l’échelle locale, cette manière d’être Église : comment gérer de façon féconde les tensions internes d’une paroisse, associer activement les jeunes à la prise de décision, ou encore rendre la formation théologique plus accessible aux laïcs.

La tonalité du pape : humilité et espérance

L’homélie du pape lors de la messe de clôture à Saint-Pierre a été l’un des moments les plus saisissants. Il a parlé de l’Église comme d’une communauté d’amour :

« La règle suprême dans l’Église est l’amour. Personne n’est appelé à dominer ; tous sont appelés à servir. Personne ne détient la vérité entière ; nous devons la chercher ensemble, guidés par l’Esprit. »

Il a invité à rêver d’une Église humble : non fière comme un pharisien, mais inclinée pour laver les pieds de l’humanité. Une Église qui ne juge pas, mais qui accueille ; qui ne se replie pas sur elle-même, mais qui écoute Dieu et le monde.

Cette image - d’une Église qui écoute plutôt que de parler, qui sert plutôt que de gouverner - peut sembler idéaliste, mais elle repose sur des racines théologiques profondes. Elle rappelle le Concile Vatican II (1962-1965), qui décrivait l’Église comme un « peuple de Dieu en marche ». Ce qui était alors une vision prend aujourd’hui une forme concrète.

Une rencontre avec le monde

Entre les différentes sessions, nous avons également rencontré l’ambassadrice des Pays-Bas auprès du Saint-Siège, Madame Annemieke Ruigrok. Elle a souligné à quel point ce mouvement d’écoute et de dialogue est également perçu à l’international, ainsi que le rôle de l’Église comme interlocuteur sur la scène mondiale.

Nous avons en outre participé à une rencontre de la School for Synodality du Royaume-Uni, un réseau de catholiques enthousiastes qui apprennent comment les processus synodaux peuvent se développer dans les paroisses. Leur enthousiasme était communicatif. Nous avons rapporté quelques belles idées afin de voir comment les adapter aux Pays-Bas.

Le samedi matin, nous avons passé en pèlerinage la Porte Sainte de la basilique Saint-Pierre : un chemin symbolique qui fait ressentir ce que signifie être « ensemble en chemin ». Pas de résultat immédiat, mais un mouvement commun.

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L'équipe avec l'ambassadrice des Pays-bas près le Saint-Siège, Madame Annemieke Ruigrok.

Richard Steenvoorde, OP


“L’Église de demain ne se construira pas par davantage de décrets ou de structures, mais grâce à des personnes qui oseront l'écoute"