Moi j'aime ceux qui me plaisent, j'aime ceux qui sentent et pensent comme moi, ceux que j'estime et que j'admire, ceux dont je reçois et auxquels je rends du bien. J'aime ceux que j'aime, enfin, même sans raison.

Mais pourquoi dois-je me contenter d'aimer ceux que j'aime et dois-je me forcer à aimer celui que je n'aime pas ? Parce que ceux que tu aimes sont encore toi, tandis que celui que tu n'aimes pas c'est vraiment l'autre.

Et pourquoi dois-je aimer l'autre ?

Pour sortir de prison, celle de mon moi, pour ne pas mourir. Et les murs de cette prison, ce sont les autres, car c'est à eux que je me heurte. Là où ils commencent, là je finis. Ils m'enserrent de toute part. Je pousse pour gagner un peu d'espace, mais tous en font autant et nous nous écrasons.

Dès que j'aime, une fenêtre s'ouvre et par là j'échappe. L'amour d'un autre double d'un coup l'étendue de mon être renforcé par le sien. Sa vie réveille ma vie et ma pensée. Les biens de l'un enrichissent les deux. Les peines se partagent et les joies se multiplient. Les barrières et les contraintes tombent et les horizons se découvrent. Je suis entré dans le pays de la vie.

Moi, mon unité vivante intérieure est union, est amour par essence et tout ce qui est amour m'exalte, m'agrandit, me libère.

Et l'Amour, c'est Dieu, de quelque nom qu'on nomme Dieu, et même si on ne le nomme pas.