Article header background
Répertoire
Jean-Bertrand Madragule
image

4ème Dimanche ordinaire C - Présentation du Seigneur

L’écrivain et journaliste français Guy de Maupassant écrivait au XIXe siècle : « Ce sont les rencontres avec les hommes qui rendent la vie digne d’être vécue. » Nous avons tous déjà vécu des rencontres de ce type, au cours desquelles nous avons pensé : « C’est la rencontre la plus importante de ma vie ».

image

Durant tout le Temps de Noël, nous avons célébré le mystère de l’Incarnation, c’est-à-dire le fait que Dieu se soit fait l’un de nous. Aujourd’hui, lors de la Fête de la Présentation du Seigneur au Temple, nous célébrons l’Incarnation comme une « rencontre de Dieu avec l’humanité », symbolisée par la rencontre au Temple, le quarantième jour après la naissance de Jésus. Pourquoi cette fête est-elle célébrée 40 jours après la Nativité ? Et au-delà de cela, la question principale que nous pose cette fête est la suivante :

Qui est Jésus pour nous, les hommes ?

Dans le livre du Lévitique, il est prescrit la purification d’une femme qui a donné naissance à un garçon (Lv. 12, 1-8). Au quarantième jour, la femme accouchée doit ensuite faire offrir par le prêtre un agneau d’un an ainsi qu’un pigeon ou une tourterelle en holocauste ; si elle est pauvre, elle pourra offrir deux tourterelles ou deux colombes. Le livre de l’Exode prescrit également le rachat du premier-né qui appartient à Dieu (Ex 13, 2 et 13).

Conformément à la loi de Moïse, Marie et Joseph conduisent Jésus au Temple de Jérusalem le quarantième jour. Ce qui est intéressant, c’est que Marie n’a pas besoin d’être purifiée, car elle a été préservée de tout péché. Elle n’a fait qu’obéir à la Loi de Moïse et a ainsi accompli les promesses. Concernant le deuxième acte cultuel, Luc parle de l’offrande de deux tourterelles ou deux colombes (Lc 2, 24) ; une offrande de pauvre, selon Lévitique 12, 8. Concernant le troisième acte cultuel, Luc ne mentionne plus le « rachat » du premier-né, mais la Présentation de Jésus au Temple (Lc 2, 27).

image

Regardez ! Quelque chose de merveilleux se produit lors de la Présentation ou de la Consécration de Jésus ! La rencontre de la famille de Jésus au Temple ne se fait pas avec les prêtres et les docteurs de la Loi, mais avec deux anawin, c’est-à-dire deux pauvres de Yahvé : Siméon et Anne. Siméon n’appartient pas à la caste sacerdotale. Il est simplement décrit comme « un homme juste et religieux, qui attendait la Consolation d’Israël, et l’Esprit Saint était sur lui » (Lc 2, 25). Le vieil homme prend l’enfant Jésus dans ses bras et chante un chant de louange. Il reconnaît en l’enfant le Messie promis par Dieu. Le vieil homme peut ainsi mourir en paix, car il a vu le salut qu’offre le Messie.

La famille de Jésus a également rencontré une femme dans le Temple : la prophétesse Anne. Âgée de quatre-vingt-quatre ans et devenue veuve après seulement sept ans de mariage, Anne ne s’éloignait pas du Temple : elle servait Dieu jour et nuit dans le jeûne et la prière (Lc 2, 37). Elle chantait aussi la louange du Seigneur et est devenue l’annonciatrice et témoin du salut qu’apporte le Messie.

Pour Siméon et Anne, cette rencontre avec l’enfant Jésus est la plus importante de leur existence. En Jésus, ils rencontrent Dieu lui-même. Ils reconnaissent que Jésus est le Messie, le Christ. Ils sont extrêmement heureux que Dieu leur montre la lumière des nations et qu’ils puissent accueillir le Sauveur en personne. Pour eux, ce moment est le point culminant de leur vie. Ils ont attendu cette rencontre toute leur vie.

La présentation de l’Enfant Jésus nous montre sa « première visite » au Temple, où il accomplit la Loi de Moïse. Jésus manifestera alors son intérêt profond envers le culte et la Loi, et prendra ainsi part aux rites et aux festivités. Déjà à l’âge de 12 ans, il se rend avec ses parents à la fête de la Pâque à Jérusalem pour accomplir la Loi. Plus tard, durant son ministère public, il purifiera des lépreux et leur recommandera aussitôt d’aller se présenter au prêtre et d’offrir ce qui est dû selon la Loi de Moïse (cf. Lc 17, 14 ; Lv 14, 1-31). Il paiera l’impôt du Temple (Mt 17, 24-27).

image

L’attitude de Jésus à l’égard de la Loi de Moïse est similaire à celle des prophètes. Il s’y est soumis en déclarant qu’il était venu non pas pour abolir la Loi ou les Prophètes, mais pour les accomplir (Mt 5, 17).

Qu’est-ce qui différencie l’enseignement de Jésus des autres ? Quelle est la nouveauté de son enseignement ?

Dans ses différentes confrontations avec les Pharisiens et les Scribes, Jésus critique l’observation formaliste de la Loi. La religion ne se réduit pas à l’observation stricte de la Loi. Ne nous arrive-t-il pas souvent de penser que nous sommes de bons chrétiens si nous assistons à la messe tous les dimanches et si nous observons tous les préceptes de l’Église ? Ne pensons-nous pas être de bons religieux ou de bonnes religieuses si nous respectons fidèlement toutes nos Constitutions et nos règles liturgiques ?

Pour Jésus, ce qui est au cœur de la religion ne se réduit pas aux observances cultuelles ou rituelles. La participation à l’Eucharistie dominicale et l’observance des règles de vie religieuse sont certes importantes, mais elles ne sont que l’expression de notre volonté de nous laisser transformer par l’Évangile. Autrement dit, ce n’est pas tant les observances des règles en elles-mêmes qui sont importantes, mais plutôt la manière dont nous les mettons en œuvre au quotidien, dans notre vie, notre famille, nos communautés et notre milieu de travail, en faisant preuve d’amour et de miséricorde. L’amour vrai cherche le bien du prochain, créé à l’image de Dieu. C’est sur ce point concret que la Présentation du Seigneur au Temple nous attend et nous interpelle.

Dans l’Évangile de Luc d’aujourd’hui, Siméon et Anne reconnaissent en l’Enfant Jésus le Sauveur du monde. Le Christ est la Lumière dans l’obscurité de ce monde, la Lumière dans l’obscurité de notre vie. Dieu cherche aujourd’hui des hommes et des femmes, comme Siméon, Anne, Joseph et Marie, pour être les porteurs de cette Lumière.

En cette Journée de prière pour la Vie consacrée, nous sommes invités à être des témoins de la Lumière dans les différentes situations de la vie, en commençant par notre propre famille. Être témoin de la lumière signifie en effet se laisser transformer par l’Évangile de l’Amour. Ce n’est qu’à ce prix que l’observation fidèle de la Loi devient le moment le plus important de la rencontre avec Dieu.

Le Pape saint Paul VI écrivait en 1975 dans son Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi sur l’évangélisation du monde contemporain : « L’homme d’aujourd’hui [...] préfère écouter les témoins plutôt que les savants, et s’il écoute les savants, c’est précisément parce qu’ils sont des témoins » (EN, 41). Amen.

Pape Saint Paul VI

Evangelii nuntiandi, 41

“L’homme d’aujourd’hui [...] préfère écouter les témoins plutôt que les savants, et s’il écoute les savants, c’est précisément parce qu’ils sont des témoins ”

Copyrights : Lawrence Lew OP