« Qui est ma mère ? Qui sont mes frères ? »

À son époque, on n’existait pas sans sa famille : on était le fils d’Untel, le frère ou la soeur d’Unetelle. D’ailleurs, la groupe des frères et soeurs était beaucoup plus grand que celui formé par ceux qui avaient le même père et la même mère. Cela regroupait tous les cousins et cousines avec lesquels on était éduqué. Ce groupe était tellement grand qu’il se suffisait à lui-même. Si quelqu’un était malade, il y avait toujours un cousin ou une cousine pour veiller sur elle. C’était très bien, mais c’était parfois un peu étouffant. Il fallait épouser quelqu’un de sa famille, comme Ruth avec Booz, et Tobie qui avait dû partir au loin se chercher une cousine à marier.

C’est certainement contre cette conception fermée de la famille que Jésus réagit dans cet Évangile. Il n’était pas venu sauver la famille de Joseph et de Marie, mais toute l’humanité. C’est pour cela que nous ne célébrons pas la messe à la maison, mais dans une église, un lieu public où tout le monde peut venir. C’est pour cela que nous pouvons ouvrir notre solidarité à tous les membres de notre communauté, et pas seulement aux gens de notre famille. Saint Paul s’était fâché contres le Corinthiens parce que chacun apportait sa propre nourriture lors des repas communautaires, et, au lieu de tout mettre en commun, chacun mangeait de son côté. Les uns s’enivraient, tandis que d’autres n’avaient presque rien à manger.

Voilà sans doute une bonne attitude à adopter : retenir ce que nous avons reçu de meilleur dans notre famille pour l’offrir à toute la communauté. Garder les belles leçons de solidarité et d’amour vécues dans notre famille pour les partager avec tous nos frères et soeurs en Jésus-Christ. C’est ce que nous saisons quand nous nous mettons en ménage. On commence quelque chose de nouveau à partir de ce qu’on a reçu et de ce qu’on est.

Cela fait partie de la loi du développement de la vie. L’enfant sort de sa mère et va à la découverte du monde. Le jeune homme quitte son père et sa mère pour fonder un nouveau foyer. Le chrétien s’élève vers Dieu pour revenir plus riche en amour et plus fort dans les difficultés.

Philippe Henne op