C'est donc avec un bonheur indicible que je succombe à ces tentations et je ne le regrette jamais carje pense qu'il y a au moins trois types de tentations. Les premières, comme celles dont je viens devous parler, nous font du bien. Il serait bien dommage d'y résister. Au-delà de l'exemple pris, dansnos vies, il y a de nombreuses tentations heureuses qui nous font grandir. Elles sont essentiellespour notre accomplissement. Nous ne pouvons pas nous en passer. En effet, il est heureux quenous soyons tentés d'entrer dans une nouvelle relation faite d'amour ou d'amitié. Il est heureux pourun patient de succomber à la tentation de retrouver la santé. Il est heureux que nous puissionsprendre du temps pour vivre des instants de bonheur. Il est heureux que tout homme, toute femme,cherche à s'accomplir sur cette terre. Ces tentations-ci sont de véritables béatitudes et je pense quenotre Dieu, révélé en Jésus-Christ, par son Esprit, nous invite à en vivre pleinement car elles nous fontgrandir au plus profond de notre humanité.Il y a par contre d'autres tentations qui ne nous font plus grandir. Cette deuxième catégorie detentations vient plutôt grossir l'ombre de certaines zones de nos personnalités. A court terme, nouspouvons croire qu'elles nous sont nécessaires et nous font du bien. Mais, après réflexion, il y auralieu de reconnaître qu'à long terme, ces tentations nous déshumanisent. Elles ne participentnullement à notre construction intérieure et à l'accomplissement de notre bonheur. Pire, elles peuventnous détruire de manière sournoise. Face à elles, nous avons à tout mettre en oeuvre pour résister.Cette fois, nous chercherons à ne pas nous laisser tenter mais plutôt à nous éloigner d'elles car ellesvont venir encombrer les tréfonds de notre âme. Ce sont ces tentations-ci que le Christ va rejeter lorsde son expérience au désert. Au cours de l'histoire relatée dans l'Ancien Testament, Israël vatrébucher sur chacune d'entre elles et ira jusqu'à se perdre à chaque fois. Jésus nous invite à ne pasnous enfermer dans une vision magique de la vie, à ne pas nous barricader dans une quêteincessante de pouvoir, à ne pas nous calfeutrer dans un désir de toute-puissance au service de nospropres égoïsmes. Ces tentations ne nous feront pas du bien. Elles sont une illusion de notreimaginaire et elles nous détruiront à petit feu que nous le voulions ou non. Les premières nousfaisaient grandir sur le chemin de notre humanité, les deuxièmes viennent grossir les failles de notreinhumanité et nous conduisent vers une mort intérieure certaine.Quant au troisième type de tentation, je me permettrai de vous proposer l'adage suivant : « pasd'alléluia, pas de chocolat ». Je m'explique. Durant le Carême, nous ne chantons pas l'alléluia. Cen'est pas une simple question esthétique. Ce n'est pas non plus une privation pour une privationcomme cela avait été compris durant de nombreux siècles. Non, le fait de ne pas chanter l'alléluia,c'est vivre l'expérience d'un jeûne intérieur pour mieux entrer dans le mystère de Pâques que nouscélébrerons dans un peu moins de quarante jours. En ne le chantant pas au cours de noseucharisties de Carême, nous refaisons l'expérience du manque. Non pas le manque pour le manquemais plutôt un manque qui nous ouvre vers un ailleurs, vers un mieux-vivre. Un manque qui nouscomble car il nous permet, dès l'instant où nous le ressentons, de revenir à l'essentiel, à l'existentiel etpour nous, croyantes et croyants, il s'agit de la lumière de Pâques. Ces petites privations que nousnous offrons n'ont de sens que si elles nous ramènent chaque fois vers une vie vécue au rythme del'amour puisque, comme le souligne le poète, l'amour est la plénitude du manque. Et c'est pour cela,que nous cherchons à aimer l'autre et le Tout Autre afin que nous puissions les uns et les autres nouscombler et participer ainsi à la construction du Royaume de Dieu. S'il en est ainsi, alors succombonsaux tentations qui nous font grandir en humanité, rejetons celles qui font grossir nos failles ombragéeset vivons avec joie, durant quarante jours, le « pas d'alléluia, pas de chocolat » car ce jeûne toutintérieur nous conduira mieux encore au mystère de Pâques.
Amen.
Premier dimanche de l'Avent
Certains de mes frères dominicains prétendent que si vous devez m'indiquer la direction d'une destination, il ne vous servira pas à grand chose de nommer les noms des églises devant lesquelles je devrai passer. Il semblerait, toujours selon eux, que ma culture n'est pas très développée à ce niveau. Par contre, si vous souhaitez que j'arrive à destination, il vous suffira de donner les noms des restaurants se trouvant sur mon chemin. Là, je risque de ne plus me tromper. Fort de ce constat et suite à la lecture de l'évangile, si vous devez prendre l'autoroute tout à l'heure en quittant cette église. Je vous invite à reprendre la route en passant par le Boulevard d'Avroy et juste avant de tourner à droite pour vous engager sur une route vous conduisant à la bretelle de l'autoroute, vous passerez devant le restaurant Tentation où la chef Roxanne Vranken se fera un plaisir de vous proposer une déclinaison de menus à trois, cinq, sept ou dix tentations. Chaque que j'y ai été invité, j'ai toujours succombé à la tentation d'un de ces délicieux menus plein de créativité.