En cette fin d’été, nous sommes invités à réfléchir et méditer sur « notre croix », entendue comme le chemin de vie que chacun de nous suit de manière unique et personnelle. Comment vivons-nous les grands événements qui jalonnent notre parcours et sur lesquels nous n’avons aucune prise: est-ce que nous nous révoltons, est-ce que nous nous résignons, est-ce que nous les acceptons, voire les accueillons?

Dans l’évangile de ce jour, Pierre est révolté. Il ne se reconnaît pas dans le portrait du messie qui se dégage des paroles de Jésus et ne peut pas accepter ce destin funeste qui attend son Maître et ami à Jérusalem. Non le Messie de sa profession de foi, « le Fils du Dieu Vivant » ne peut subir un tel sort! La réaction de Pierre nous semble bien humaine: spontanément, il a le réflexe de vouloir protéger Jésus du terrible destin qui l’attend à Jérusalem. Mais a-t-il une notion juste du messie? Apparemment non ! La profession de foi de Pierre semble porter sur un malentendu, et traduit un faux espoir de libération de type politique.

Jésus entreprend donc d’élucider ce malentendu. Il se dévoile un peu plus en indiquant le chemin qui conduit à la gloire du Messie:«la passion, la mort et finalement la gloire de la résurrection ». Un portrait du messie peu flatteur. C’est un Messie fragile ! Mais Pierre, et comme lui, un peu chacun de nous, nous ne comprenons pas ! Car nous avons une fausse image du Messie, et nourrissons d’autres attentes de lui. Comme Pierre, nous sommes donc déçus. Car le portrait du messie qui se dessine dans l’évangile n’est pas celui (d’un messie) qui domine les forces du mal et de la violence, mais c’est un Messie qui subit la violence, qu’on attrape aisément et qu’on met à mort. Il n’est pas celui qu’on adule et qu’on applaudit comme une vedette, mais un messie bafoué qu’on cloue à une croix.

Aujourd’hui, la Covid19 a mis à nue notre fragilité face à la maladie: des vies emportées, pertes d’emplois, nos vies sont paralysées…: nous nous barricadons devant la souffrance, nous la fuyons ou nous essayons de l’éviter. Et pourtant, elle existe. Et quand elle frappe à notre porte, sous les traits de la vieillesse, de la maladie, de la mort ou sous le visage de l’échec ou de la souffrance morale, quand elle frappe à notre porte, elle nous renverse, nous écrase… oui, nous réagissons mal devant la souffrance. Comme Pierre, nous ne comprenons pas que le Messie nous invite à porter chacun sa croix et à le suivre.

Les disciples du Christ prêts à tout abandonner à la moindre contrariété ne semblent pas l’intéresser, comme si le Christ attendait autre chose de ses disciples. En fait, ce qu’il attend de nous, même deux mille ans plus tard, c’est que nous croyons. Croire, c-à-d faire confiance à ce qui peut sembler impensable, inimaginable. Voilà pourquoi, comme Pierre, nous devons retrouver notre place de disciple derrière Jésus, et mettre nos pas dans les siens. Et le chemin que Jésus nous propose n’est pas un chemin de facilité, il passe par la croix, c’est-à-dire, la souffrance et la mort, mais au-delà de la mort, la gloire de la résurrection.

La réaction de Pierre nous semble légitime! Spontanément, il a le réflexe de vouloir protéger son Maître du terrible destin qui l’attend à Jérusalem. Mais il oublie l’essentiel, Pierre ne considère que l’immédiat, le bonheur présent, et néglige notre véritable destinée aux côtés de Jésus, « dans la gloire du Père » . « Certes, le chemin qui y mène passe par la croix. Mais celle-ci peut devenir chemin de vie puisque le Christ a vaincu la mort: par sa résurrection, nous sommes sauvés». Ne te décourage pas nous dit Jésus! Reprend ta place de disciple derrière le Christ, et tu verras, il se chargera de ton fardeau jusque dans son royaume de lumière. Amen.