La main est cette partie du corps tellement importante qu'elle est mentionnée par deux fois dans l'évangile que nous venons d'entendre. Nous sommes la main du Père, nous sommes la main du Fils et personne ne peut nous y arracher. Quelle annonce merveilleuse de se savoir ainsi la main de Dieu sur notre terre. Ne serait-il pas heureux de répondre à la personne qui nous demande : « où habitez-vous ? », de pouvoir lui dire : « j'habite la main de Dieu ». Elle vous rétorquera peut-être : « je ne connais pas cet endroit ». A nous de lui annoncer, « et pourtant, toi aussi, tu vis là car cette main divine est le lieu de notre domicile intérieur ». Avec le Père, dans le Fils et par l'Esprit, nous sommes également un. Il ne s'agit pas d'une fusion mais plutôt d'une altérisation. Nous sommes unis l'un à l'autre. Entre Dieu et chacun d'entre nous, il y a une unité inséparable, indissociable. Nous formons un tout dans lequel chacune des parties occupe sa propre place. L'altérisation permet de reconnaître que nous sommes autres au coeur de cette unité. Mieux encore, l'altérisation permet à chacune des parties en présence de devenir ce qu'elles ont à être. En tant qu'êtres humains, nous sommes conviés à accomplir notre destinée en veillant à toujours être le plus justement ajusté à la volonté divine. De cette manière, nous nous accomplirons. Heureux sommes-nous alors d'avoir la main de Dieu comme domicile. Toutefois, en aucune manière, cette main ne peut se réduire à une résidence du coeur. Toute main a pour vocation de participer à la création divine. Par cette union sacrée, nous sommes invités à devenir la main de Dieu à l'oeuvre dans notre monde. Dieu a besoin de nous. Il ne peut se passer de nous pour que sa douceur et sa tendresse puisse s'exprimer au coeur de notre humanité. En effet, parfois Dieu peut nous sembler bien loin, trop silencieux, voire absent de notre monde. Une certaine forme de désespérance peut nous envahir lorsque nous sommes confrontés à l'injustice de la maladie, au départ trop brutal d'un être aimé, à la perte d'un emploi, au sentiment d'une tyrannie subie. Nous crions alors vers le Ciel pour clamer toute notre souffrance, toute notre innocence. Nous nous époumonons et pouvoir avoir le sentiment d'un grand vide, de ne pas avoir été entendu comme si Dieu s'en était allé vers d'autres contrées. L'évangile de ce jour nous prie de ne pas regarder vers les cieux mais plutôt de nous tourner vers les mains de celles et ceux qui sont à nos côtés et qui croisent la route de notre destinée. En prenant conscience d'une telle réalité, nous pouvons redécouvrir une présence divine beaucoup plus proche que nous n'aurions jamais pu l'imaginer. Oui, toutes et tous, unis à Dieu, nous sommes ses mains. Dorénavant, Dieu passe par nous. Nous devenons ainsi Dieu à l'oeuvre dans notre monde. N'est-ce pas cela avoir le coeur sur la main ? Notre coeur ne se prouve à lui-même que lorsqu'il s'éprouve dans la manière dont nous nous ouvrons à celles et ceux de qui nous nous faisons proches. Notre coeur n'est pas un simple organe vital. Il se laisse décliner par l'usage de nos mains lorsque ces dernières se mettent à vibrer au son de la tendresse. Elles deviennent ainsi de véritables caresses de vie. Elles offrent ce baume nécessaire pour atténuer toute douleur vécue. Laissons-nous toucher par toutes ces mains tendues et à notre tour, par nos mains, touchons le coeur de celles et ceux que nous croisons car nous en avons toutes et tous besoin. Devenons en toute sensibilité cette main divine au coeur de notre humanité.
Amen.