Cette image nous conduit donc au troisième dimanche de l’Avent, où la figure de Jean le Baptiste revient. Mais cette fois, il n’est plus dans le désert de Judée : il est emprisonné. Hérode Antipas l’y a jeté pour avoir osé dénoncer son union avec Hérodiade, la femme de son frère Philippe (Mt 14, 3-4).
Enfermé dans sa cellule, Jean entend parler des œuvres accomplies par Jésus (Mt 11, 2). Mais ces récits, loin de le rassurer, ébranlent sa foi. Le doute s’installe. Dans l’urgence de celui qui sait que la mort est imminente, il envoie alors ses disciples vers Jésus pour lui poser la question qui le tourmente : « Es-tu vraiment le Messie que nous attendons, ou devons-nous espérer un autre ? » (Cf. Mt 11, 3). Pour un prisonnier qui marche vers la mort, cette interrogation n’est pas une simple curiosité, mais une question vitale, une ultime quête de lumière.
Dans l’ombre de sa prison, Jean le Baptiste s’interroge : « Si Jésus est vraiment le Messie, pourquoi ne vient-il pas me délivrer ? » Et sa plainte rejoint la nôtre : « Seigneur, pourquoi m’as-tu abandonné dans ma détresse ? »
Cette plainte n’est pas étrangère à nos vies. Elle résonne chaque fois que nous nous sentons emprisonnés dans nos propres prisons intérieures : lorsque nous ne savons plus comment avancer, lorsque nous avons l’impression que Jésus reste silencieux, lorsque la déception nous blesse à travers nos proches, notre famille, nos amis ou notre communauté. Elle se fait également entendre lorsque nous découvrons notre propre fragilité et notre impuissance face au mal qui nous entoure, et face à celui qui habite en nous.
Nous découvrons en effet dans la Bible que même les grandes figures spirituelles, comme Jean le Baptiste, ont connu des périodes de doute. Cela nous rappelle que nous avons également le droit de nous interroger, de nous plaindre, de pleurer ou même d’exprimer notre colère.
Chacun de nous a besoin d’un « Mur des Lamentations », un lieu où déposer ses fardeaux.
Le Mur des Lamentations, situé dans la vieille ville de Jérusalem et construit par Hérode le Grand, est devenu, au fil des siècles, un symbole universel de prière et de confiance. Juifs et non-juifs s’y rendent pour se recueillir, glisser dans les interstices des pierres leurs vœux, leurs prières, leurs inquiétudes et leurs espoirs.
Je me souviens particulièrement de l’image du Pape Jean-Paul II, en l’an 2000, déposant lui aussi une prière dans une fissure du mur. Cette scène est restée gravée dans ma mémoire. Elle me revient souvent à l’esprit dans les moments difficiles, comme une source de courage et d’espérance.
Ainsi, nous pouvons nous présenter devant Dieu tels que nous sommes, avec nos préoccupations, nos doutes et nos blessures. Rien n’est trop petit ni trop grand pour lui. Et lors de cette rencontre, nous trouvons la force de continuer et l’espérance d’un avenir renouvelé.
Dans les heures sombres, le prophète Isaïe rappelle, dans la première lecture, une espérance qui ne s’éteint jamais (Isaïe 35, 1-6a.10). Après quarante années d’exil, le peuple juif s’apprête à retrouver la Terre promise en traversant le désert de Syrie. Ce désert qui refleurit devient alors le symbole puissant et ancien de l’espérance : la vie qui jaillit là où tout semblait voué à la mort. L’expérience de l’exil, avec son lot de nostalgie, se transforme alors en une joie immense : celle du retour en Israël, où la mémoire des souffrances se mêle à la promesse d’un avenir renouvelé.