Ce petit conte de Noël contemporain peut apparaître blasphématoire pour certains. Et pourtant, telle n'est pas mon intention. Si je vous l'ai raconté, c'est parce que j'ai le sentiment que face à un tel événement à ce point inattendu nous serions sans doute pour beaucoup choqués. Ce n'est pas comme cela que nous l'avions imaginé, attendu le retour du Messie. Tout comme les gens, il y a deux mille ans. Ils attendaient un " Merveilleux-Conseiller, Dieu-Fort, Père-à-jamais, Prince-de-la-Paix ", comme le proclamait Isaïe. Et ils découvrent que ce Dieu promis est un bébé emmailloté dans une mangeoire. Pauvre parmi les plus pauvres. Ils étaient, je pense, aussi étonnés que nous ne le serions si mon petit conte était devenu réalité.En cette nuit de Noël, Dieu nous invite à faire place à l'imprévu, place à l'inattendu. La foi en Jésus Christ qui nous rassemble aujourd'hui ne peut passer que par l'étonnement. Nous pourrions presque affirmer qu'avoir la foi, c'est être étonné. Certains sont étonnés que nous puissions croire et nous, nous croyons car nous sommes des êtres non seulement étonnants mais également étonnés. Des étonnés de l'amour de Dieu pour sa création, des étonnés de l'amour de Dieu qui se dévoile dans toute relation où chaque être est libre d'aimer. Tant que je ne serai pas étonné, je ne serai pas croyant comme si, lorsque j'arrête de m'étonner, je perds la foi. Tout simplement parce que le visage de Dieu, tel qu'il nous est révélé par Jésus, est étonnant. L'évangile est étonnant.Dès lors, croire est étonnant. Par le mystère de l'Incarnation, nous devenons les étonnés de la vie. En nous, nous laissons une lézarde dans nos certitudes intérieures pour laisser surgir l'imprévu, l'inattendu de Dieu. Nous nous ouvrons à l'irruption du nouveau dans notre vie. Nous lâchons prise parce que nous acceptons que c'est dans cet inattendu que Dieu nous attend. Lâcher prise, c'est se reconnaître non maître de son histoire et de sa destinée. C'est ne pas adapter l'événement à mes propres désirs mais recevoir chaque jour, chaque instant comme il vient et pouvoir m'en réjouir. Lâcher prise, c'est accepter que tout ne nous appartient pas, qu'il y a une grande part de mystère en Dieu, en l'autre mais également en nous. C'est donc se déprendre de nous-même pour mieux vivre et grandir pour l'avenir. En lâchant prise, je crains moins et j'aime davantage.C'est vrai, lorsque je contrôle tout, je me rassure ; tandis que lorsque je laisse place à l'imprévu, à l'inattendu, je lâche prise et donc, je peux vivre. Noël nous convie de la sorte à laisser place en nous pour mieux nous abandonner dans le coeur de Dieu. Vivre de cette confiance que le bonheur est un chemin proposé à chacune et chacun même si les ronces de la violence désenchantent le monde dans lequel nous sommes pour le moment. Vivre la vie avec étonnement pour redécouvrir les merveilles de chaque instant. Cueillir et accueillir l'imprévu des événements comme richesses à dépasser et bienfaits à découvrir. Si l'inattendu et l'imprévu nous déstabilisent, rappelons-nous qu'à tout instant qui passe, le Christ frappe lui aussi à notre porte de façon toujours inattendue. C'est dans l'inattendu et l'imprévu de l'événement que Dieu se révèle à nous en cette nuit de Noël. Que dans la foi, nous puissions nous en réjouir pour que l'étoile de Noël ne se lasse pas en une nuit mais s'offre à nous dans l'étonnement de chaque instant. S'il en est ainsi, dans l'inattendu de cet événement merveilleux, il me reste à vous souhaiter un Joyeux Noël.
Amen.