Revisitons alors le récit que nous venons d’entendre. A l’aube profonde, écrit Francine Carillo, « les femmes arrivent pour l’embaumement comme on arrive pour l’enterrement d’une espérance. Dans leur cœur, les souvenirs ont déjà le goût de cendres. Il est vrai que nous pensons rarement au futur dans les cimetières ! » Or, la pierre qui retenait la vie a été roulée sur le côté ; la pierre du passé a roulé loin de la mort ! Mieux encore, la vie qui était captive de la mort a été libérée de ses entraves. Et Jésus Christ est devenu notre éternel printemps. Puisque l’événement de Pâques célèbre la vie, puisque l’événement de la résurrection du Fils de Dieu enfante une nouvelle humanité, puisque l’événement du tombeau vide enrichit tout être humain d’une dimension résurrectionnelle, il fallait que ce soient des femmes qui découvrent ce merveilleux mystère car par nature, elles donnent et/ou accompagnent la vie. Avec cet événement tout empreint de délicatesse, la mort a perdu sa puissance. Il y a maintenant non seulement l’espérance d’une vie après la mort mais également la certitude d’une vie avant la mort. La fin est devenue un commencement ! La vie nous ouvre vers demain ! Et c’est dans le lieu même du tombeau, au plus profond de notre nuit qu’une parole claire et neuve nous rejoint à notre tour : « Ne soyez pas effrayés ! Vous cherchez Jésus de Nazareth, le Crucifié ? Il est ressuscité : il n’est pas ici. Voici l’endroit où on l’avait déposé. » La vie est donc plus forte que la mort et tout vivant, en commençant par le Christ, le premier des vivants, n’a plus sa place dans les tombeaux de ce monde, dans le tombeau de la mort. Le tombeau vide s’ouvre à la Vie. Il n’est donc pas un mémorial de nostalgie. Au contraire, il nous ouvre les portes d’un avenir abondant de vie. Pour ce faire, à notre tour de vivre l’expérience de ce tombeau vide, car c’est précisément là où naît voire renaît la foi, l’espérance et l’amour. Il nous faut nous aussi passer par celui-ci car il faut du temps pour apprivoiser la résurrection, il faut du temps pour apprivoiser sa propre résurrection ! Cette dernière n’est donc pas seulement une promesse pour demain. Elle se vit dès à présent dans le quotidien de nos existences. C’est au cœur de notre propre Galilée que le Fils de Dieu vient nous retrouver et nous accompagner. La Galilée est synonyme de cette vie ordinaire que nous menons, de ces rencontres que nous chérissons, de ces attentions que nous partageons, de cette tendresse que nous nous offrons. C’est dans ces lieux et ces moments précis que le Christ vient nous rejoindre et nous soutenir pour que nous vivions passionnément nos vies. Par sa résurrection, il a fait de chacune et de chacun de nous des êtres résurrectionnels, c’est-à-dire des hommes et des femmes qui dorénavant vivent leur vie à la lumière de cette foi, de cette espérance et de cet amour qui les habitent. Pour tout être humain, la vie est une partition de musique avec ses moments joyeux mais graves aussi. Il y a des temps piano, mezzo forte et fortissimo mais également des silences nécessaires pour que nous puissions à nouveau respirer afin de mieux reprendre le chemin de la vie. Nous pouvons lire la partition de nos vies de manière ordinaire en clé de sol, de fa ou d’ut. Toutefois, par l’événement de la résurrection, nous pouvons également vivre la partition de notre vie avec la clé de Dieu. Cette dernière offre une toute autre tonalité. Et voici que la mélodie devient symphonie. Osons alors aller à contre-courant de la morosité de notre monde. Réjouissons-nous de notre foi et de notre espérance en la résurrection du Fils de Dieu. Nous faisons ainsi l’expérience que notre foi en Dieu décuple nos possibilités de vie, élargit nos horizons de destinée et renforce nos relations d’amour et d’amitié. Telle est l’espérance de Pâques qui nous renouvelle à l’Amour. Oui, Il est vraiment ressuscité !
Amen.
Vigile de Pâques
Pour comprendre le mystère qui nous rassemble en cette nuit, il y a peut-être lieu de prendre le temps d’observer les saumons. Je dis bien les saumons. Ces derniers remontent les rivières et vont donc à contre-courant. Un peu comme ce que nous commémorons depuis plusieurs jours. Dieu lui-même est allé à contre-courant. Les disciples du Christ attendaient le libérateur d’Israël et hier, nous nous sommes rappelés sa mort sur la croix. Les trois femmes vont au tombeau le retrouver et elles découvrent un lieu vide. Elles ont cru qu’il était mort et rapidement elles feront l’expérience qu’il est vivant. Tout va bien à contre-courant.